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Charles Baudelaire, Le Balcon

27.06.2020

Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses,
Ô toi, tous mes plaisirs ! ô toi, tous mes devoirs !
Tu te rappelleras la beauté des caresses,
La douceur du foyer et le charme des soirs,
Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses !

Les soirs illuminés par l’ardeur du charbon,
Et les soirs au balcon, voilés de vapeurs roses.
Que ton sein m’était doux ! que ton cœur m’était bon !
Nous avons dit souvent d’impérissables choses
Les soirs illuminés par l’ardeur du charbon.

Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées !
Que l’espace est profond ! que le cœur est puissant !
En me penchant vers toi, reine des adorées,
Je croyais respirer le parfum de ton sang.
Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées !

La nuit s’épaississait ainsi qu’une cloison,
Et mes yeux dans le noir devinaient tes prunelles,
Et je buvais ton souffle, ô douceur, ô poison !
Et tes pieds s’endormaient dans mes mains fraternelles.
La nuit s’épaississait ainsi qu’une cloison.

Je sais l’art d’évoquer les minutes heureuses,
Et revis mon passé blotti dans tes genoux.
Car à quoi bon chercher tes beautés langoureuses
Ailleurs qu’en ton cher corps et qu’en ton cœur si doux ?
Je sais l’art d’évoquer les minutes heureuses !

Ces serments, ces parfums, ces baisers infinis,
Renaîtront-ils d’un gouffre interdit à nos sondes,
Comme montent au ciel les soleils rajeunis
Après s’être lavés au fond des mers profondes ?
— Ô serments ! ô parfums ! ô baisers infinis !

 

Der Balkon

Süßer Bilder Schoß, du höchste aller Minnen,
o du, all meine Lust, o du, all mein Gebot!
Auf der Zärten Schönheit magst du dich besinnen,
des Herdes sanfte Flamme, das holde Abendrot,
süßer Bilder Schoß, du höchste aller Minnen!

Abende hell vom Flackerschein der Ofenglut,
Abende auf dem Balkon in rosiger Schleier Wallen.
Deine Brust, wie mir so sanft, dein Herz, wie gut!
Wir sprachen oft von Dingen, die nicht ins Dunkel fallen,
an Abenden hell vom Flackerschein der Ofenglut.

Wie Sonnen an lauen Abenden schöner untergehen!
Der Raum, wie er sich weitet, das Herz, wie pulst es wild!
Wenn ich mich zu dir neigte, Königin der Feen,
schien mein Atem vom Dufte deines Bluts erfüllt.
Wie Sonnen an lauen Abenden schöner untergehen!

Die Nacht ward undurchdringlich wie eine Nebelbank,
ich spähte ins Dunkel, ob deine Augen Funken spenden,
ich schlürfte deinen Atem, o süßer, o giftiger Trank!
Deine Füße entschliefen bei Brüdern, meinen Händen.
Die Nacht ward undurchdringlich wie eine Nebelbank.

Ich kann dem Fluß der Zeit Glückseligkeit einhauchen,
geschmiegt auf deine Kniee sink ich in ins Paradies.
Wo anders denn in deine schmachtende Schönheit tauchen
als in deines Leibes Blüte, dein Herz so süß?
Ich kann dem Fluß der Zeit Glückseligkeit einhauchen.

Diese Schwüre, Düfte, Küsse ohne Zahl,
sind aus Tiefen sie geboren, die unsren Sonden wehren,
wie Sonnen zum Himmel steigen in verzücktem Strahl
nach einem Verjüngungsbad im Grund von tiefen Meeren?
O ihr Schwüre, ihr Düfte, o Küsse ohne Zahl!

 

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